Langue des unités documentaires : Français
: Jardin d'Amour, installation de Yinka Shonibare, MBE, Musée du quai Branly.Paris, 03/04/2007-08/07/2007. Créée pour le musée du quai Branly, par l’artiste londonien d’origine nigériane Yinka Shonibare, MBE, l’installation Jardin d’amour s’inspire des jardins à la française et convie le public à s’engager dans un surprenant voyage. Dans le « jardin » entre frondaisons, fontaines et bosquets -, les visiteurs découvriront un étrange ballet amoureux… Yinka Shonibare poursuit ici sa réflexion sur l’identité et l’histoire, au croisement de ses deux cultures d’appartenance. l’artiste et son œuvre : D’origine nigériane, Yinka Shonibare est né à Londres en 1962 et y travaille. Sa réflexion commence avec la question de l'identité lorsque, étudiant, on lui suggère d'exprimer davantage ses racines dans son travail. Il s'amuse alors à juxtaposer des images d'objets du British Museum avec des appareils électroménagers et défie le spectateur de le situer dans l'un ou l'autre de ces registres. Au début des années 90, il se sert du tissu africain pour remplacer la toile. Puis sa démarche prend toute sa signification lorsqu'il introduit le tissu wax dans l'univers victorien et en habille la bourgeoisie qu'il représente par des mannequins sans tête. Dans son installation Victorian Philanthropists Parlour (1996-1997), présentée à l’exposition Africa Remix en 2005 au Centre Pompidou, il reprend un goût typiquement anglais qui consiste à reproduire à l'identique des intérieurs d'époque. Mobilier et décoration sont choisis de manière à en être le parfait reflet. Shonibare tapisse les murs et recouvre le mobilier de tissu africain, induisant ainsi une atmosphère de réalité coloniale sur laquelle s'est construite la bourgeoisie anglaise. Il évoque la notion d'authenticité, en rappelant que ce tissu a été manufacturé en Angleterre au xvIIIe siècle pour le marché ouest-africain ; mais Shonibare invalide cette référence historique, par le textile, en ajoutant dans les motifs des images de joueurs de football… Ayant reçu récemment une haute distinction britannique « Member of the Bristish Empire », il a adjoint le sigle MBE à son nom. Encore une manière de souligner les paradoxes de l’Histoire. parmi ses expositions personnelles : 2002 : « Yinka Shonibare », Studio Museum, New York, États-Unis. 2003 : « Play with Me», Stephen Friedman Gallery, Londres, Royaume-Uni. 2004 : «Yinka Shonibare », Boijmans Van Beuningen Museum, Rotterdam, Pays-Bas. Le musée du quai Branly a pour vocation d’accorder une place importante à la création contemporaine. Il s’agit de la première installation d’art contemporain présentée dans la galerie Jardin, espace réservé aux expositions temporaires. Fragonard revisité : entre humour et subversion L'exposition « Jardin d’amour », de Yinka Shonibare, offre une réflexion sur l'identité et l'histoire mêlant de façon indissociable ses deux cultures d'appartenance. Elle développe un projet qui s’était amorcé au moment de l’acquisition par la Tate Modern de L'escarpolette, d'après Fragonard, et constitue une parodie de l'imagerie rococo sous la forme d'un "jardin d'amour". Elle restitue l’idée du labyrinthe et le jeu de la découverte des trois scènes amoureuses dans la progression du parcours. Cette création pour le musée du quai Branly présente trois groupes reprenant la composition de la suite de Fragonard, « Les Progrès de l’amour », réalisée à l’origine pour le pavillon de Madame du Barry à Louveciennes: La poursuite (1770) Les Lettres d’Amour (entre 1770 et 1773) L’amant couronné (entre 1770 et 1773) L’implantation des figures respecte l’esprit des jardins de l’époque, ses codes, son ordonnancement, sa végétation. Il s’agit en réalité de mannequins sans têtes, de taille humaine, habillés à la mode du xvIIIe siècle français mais avec des tissus "wax", chers aux Africains d'aujourd'hui. L’anachronisme est d’autant plus troublant que Yinka Shonibare le manipule avec esprit, sans agressivité, bien que son œuvre ait, insidieusement, la violence d’un froid réquisitoire. Cette installation souligne que la traite des esclaves favorisait l’insouciance, le libertinage, la liberté d’esprit et l’opulence propres à l’aristocratie française ; comme le dit l’artiste lui-même, désireux de faire réfléchir le public, « il y a toujours un prix pour le plaisir ». Elle établit aussi une relation sous-jacente entre le désir de maîtriser la nature, qui s’exprime dans l’art du jardin au XVIIIe siècle, et la volonté de civiliser les « sauvages ». Elle s’interroge enfin sur les conséquences actuelles du colonialisme, notamment dans la diaspora. commissaire d’exposition : Germain VIATTE conseiller scientifique : Bernard MÜLLER direction de projet : Hélène CERUTTI architecte : Régis GUIGNARD (agence Méristème)